Follow-up du colloque « Le pouvoir du patient »

Les patient·e·s sont-ils/elles suffisamment représenté·e·s dans le système de santé ? Ont-ils/elles du pouvoir ? Qu’en est-il de leurs compétences en matière de santé ? Et où est la place de la souffrance dans notre société ? Le colloque a abordé ces questions dans le cadre de quatre modules thématiques : les conditions structurelles ; les compétences en santé ; la place de la souffrance dans notre société et le pouvoir des patient·e·s dans le système de santé. Sur cette page, vous trouverez quelques impressions issues de la conférence. Un rapport plus détaillé (en allemand) se trouve ici 

Conditions structurelles

Droits des patient·e·s et obligations des prestataires de services ?

Franziska Sprecher, juriste, Université de Berne

Depuis les 20 à 30 dernières années, nous sommes peu à peu passés d’une image paternaliste du médecin à une conception plus égalitaire de la relation entre médecins et patient·e·s. Mais cet idéal juridique correspond-il vraiment à la réalité ?

La démocratisation de l’information en santé

Alain Kaufmann, chercheur en santé, Université de Lausanne

L’essor des associations de patient·e·s, qui a commencé dans la seconde moitié du XXe siècle, a fondamentalement modifié l’équilibre du pouvoir entre les patient·e·s, la politique et les institutions médicales. En Suisse, il existe encore un fort potentiel de renforcement du pouvoir des patient·e·s, notamment en termes d’influence sur le développement de la recherche.

Compétences en santé

Qui a des compétences en matière de santé et où sont-elles enseignées ?

Ilona Kickbusch, Fondation Careum

Dans notre société axée sur la santé, nous sommes constamment confronté·e·s à des incitations à changer nos comportements. Pour prendre des décisions qui sont bonnes pour notre propre santé, nous avons besoin de compétences. Cependant, en Suisse, malgré un niveau d’éducation élevé, ces compétences en matière de santé sont globalement  inférieures à ce que l’on pourrait penser.
 

« Empowerment » et les attentes de l’Etat

Karin Gasser, Office fédéral de la santé publique

L’Office fédéral de la santé publique souhaite que les les patient·e·s participent activement à la prise en charge de leur propre santé. Cela nécessite des ajustements dans le système de santé. Les personnes aux compétences faibles en matière de santé ont besoin de soutien. Comment pourrait fonctionner un tel « Empowerment » ?

La place de la souffrance dans notre société

Le pouvoir du patient – Commentaire d’un patient

Michael Rubertus, patient

Michael Rubertus vit avec le syndrome de Lynch (HNPCC) depuis 15 ans et a accepté de partager ses expériences : « Je suis un patient responsable et informé, atteint d’une maladie chronique. Mais en cas d’urgence, je suis à la merci du système. J’aimerais être inclus par les médecins comme un ‘autre professionnel’. Alors, la question du pouvoir et de l’impuissance ne jouerait plus aucun rôle. »
 

La redécouverte du patient et de la patiente

Flurin Condrau, historien de la médecine, Unviersité de Zurich

Le rôle des patient·e·s est passé par différentes phases selon l’histoire de la médecine : à l’époque pré-moderne, les patient·e·s détenaient le pouvoir ; ils et elles donnaient des instructions précises aux médecins – et ils ou elles payaient en espèces (cf. le journal du patient Samuel Pepys). Au XIXe siècle, les patient·e·s ont perdu une grande partie de leur pouvoir. Face à la modernisation de la médecine, ils et elles ont été encouragé·e·s à faire confiance aux expert·e·s. De plus en plus, la médecine s’est déplacée vers les hôpitaux. Les patient·e·s sont alors devenu·e·s des cas sur lesquels les médecins discutent entre eux.  Depuis les années 1970, le rôle à jouer des patient·e·s dans le système de la santé a été redécouvert : dans le système de santé lui-même, dans la recherche, dans la littérature d’auto-assistance et dans la culture populaire.
 

Pouvoir et impuissance en fin de vie : l’approche des soins palliatifs

Steffen Eychmüller, médecin, centre des soins palliatifs de l’hôpital de l’Ile (Berne)

Autonomie, autodétermination, droits des patient·e·s et fin de vie dans la dignité sont des mots en vogue dans notre société individualiste. Mais ces attentes peuvent-elles être satisfaites lorsque les forces de la personne diminuent, lorsque la vulnérabilité et la dépendance deviennent une réalité ? Les possibilités technico-pharmacologiques de la médecine d’aujourd’hui suscitent des attentes irréalistes : « Nous dansons autour du gouffre jusqu’à ce que cela ne soit plus possible – et ensuite nous disons adieu ». Si notre société prenait au sérieux le terme « fin de vie dans la dignité », une réévaluation approfondie de la mise en œuvre sur le terrain serait nécessaire. Car le concept médical actuellement appliqué dévalorise des facteurs de guérison essentiels.

Le pouvoir des patient·e·s dans le système de santé

La contribution de l’entraide communautaire à la santé en Suisse

René Knüsel, sociologue, Université de Lausanne

En Suisse, il existe environ 2500 groupes d’entraide traitant d’environ 300 thèmes différents, comme l’indique une enquête réalisée en 2016 par la « Hochschule für Soziale Arbeit » de Lucerne et l’Université de Lausanne. Les membres de ces groupes se soutiennent, se conseillent et s’entraident, ce qui conduit souvent à une amélioration de leur état physique et mental. La contribution des groupes d’entraide dans le secteur de la santé mériterait une plus grande reconnaissance publique.
 

L’influence des organisations de patient·e·s

Susanne Hochuli, Organisation suisse des patients (OSP)

Les patient·e·s, en tant que quatrième pouvoir du système de santé aux côtés du secteur public, des prestataires de services et des assureurs, n’ont aucun poids. Les organisations de patient·e·s n’arrivent pas à améliorer cette situation. Leur influence sur le système de santé est faible. Cela tient également au fait que la population, les payeurs et payeuses de primes, montrent peu d’engagement envers les organisations qui ne se concentrent pas sur des maladies spécifiques. L’Organisation suisse de patients (OSP), par exemple, compte moins de 10 000 membres (à titre de comparaison : le WWF Suisse en compte 270 000, Greenpeace Suisse et Pro Natura environ 140 000 membres). « Les différentes organisations doivent s’éloigner de la pensée compétitive et coopérer davantage », a récemment déclaré Susanne Hochuli dans une interview accordée à Béatrice Kübli (ASSH).

Le colloque « Le pouvoir du patient » est un colloque dans la série « Medical-Humanities » « Pouvoir et médecine ». Il a été organisé par l’ASSH en collaboration avec l’Académie suisse des sciences médicales. Les « Medical Humanities » font partie de la thématique prioritaire  «La mutation du système de santé» des Académies suisses des sciences.

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